Mesdames, Messieurs,
Chères amies et camarades,
Je vous remercie de me donner l’opportunité de parler devant vous de la lutte que nous devons mener pour faire stopper toutes les discriminations liées au genre, un combat qui m’est si cher.
Nous sommes au 21ème siècle, en 2018, pinçons-nous pour nous assurer que c’est bien la réalité et prenons quelques exemples qui tendent à prouver que l’égalité n’avance pas, mais que dans certains domaines, elle stagne, voire recule.
Parlons donc de la fin du siècle passé où nous pensions encore que tout était possible :
1971 : les femmes suisses obtenaient enfin le droit de vote, « ah bon elles ne l’avaient pas disaient quelques observateurs médusés » ! Et bien non !
1981 la Constitution fédérale intègre un article spécifiquement consacré à l’égalité entre les sexes, qui ancre l’égalité entre femmes et hommes non seulement dans le droit mais aussi dans les faits. Donc désormais tout est réglé ? Et bien non, il faut encore des lois pour le préciser.
1996 Entrée en vigueur, le 1er juillet 1996 de la Loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes : Formidable, un instrument juridique spécial de protection contre la discrimination directement applicable pour les particuliers également. Grâce à la Loi sur l’égalité, qui pourvoit conformément à l’art. 8 al. 3 Cst. l’égalité de fait entre femmes et hommes dans les relations professionnelles entre particuliers et dans les rapports de travail de droit public, les femmes et les hommes pourront désormais s’opposer plus facilement aux discriminations auxquelles ils et elles font face dans le contexte professionnel et se prévaloir du principe de l’égalité salariale inscrit dans la Constitution. Finies les discriminations dans le monde du travail? Et bien non, très vite on s’aperçoit que cette loi n’est pas assez contraignante et trop difficile à appliquer, les femmes se découragent devant de si maigres résultats avec de trop gros risque de perdre leur emploi.
2018 : Deux décennies plus tard, les femmes restent moins rémunérées que les hommes à travail égal et les plaintes pour discriminations salariales soit n’aboutissent pas, soit le résultat est si dérisoire qu’il ne permet aucune jurisprudence sérieuse.
A côté de cela, les femmes restent sous-représentées à tous les échelons des institutions politiques. Il en est de même dans l’enseignement supérieur, les fonctions dirigeantes des administrations et des entreprises.
Certains se demandent encore si les choses changeraient vraiment si plus de femmes étaient élues dans les instances politiques.
La réponse est tombée la semaine dernière, pour les sceptiques : le très modeste projet d’analyse obligatoire des salaires dans les grandes entreprises a été renvoyé en commission par les sénateurs conservateurs, tous des hommes ! S’il ressort un jour de commission, il y a fort à parier que cette mesure sera tellement édulcorée qu’elle n’aura plus aucune utilité.
Pendant que les sénateurs s’amusent, les femmes attendent.
La Conseillère fédérale Simonetta Sommaruga a indiqué « que le temps des mesures volontaires est terminé ». De notre côté cela fait tellement longtemps que nous avons arrêté de croire à la bonne volonté et au mouvement naturel. La Suisse recule dans tous les classements en matière d’égalité.
Je suis persuadée que seules les mesures contraignantes permettront d’avancer. Au sein des Verts, l’obligation statutaire de parité a fait ses preuves. Les listes sont paritaires et la représentation suit avec même dans plusieurs cas une majorité de femmes. Et lorsqu’elles sont élues, elles agissent !
Prenons les dernières tentatives : une initiative parlementaire des Verts propose de préciser dans la Constitution que les sexes doivent être équitablement représentés au Conseil fédéral. Mais le texte de la Bâloise Maya Graf a été rejeté par la commission des institutions politiques du Conseil national en janvier.
Une autre initiative des Verts est aussi en suspens au Conseil national: le texte de Sibel Arslan (BS) veut imposer aux partis de présenter des listes de candidats à la Chambre du peuple comportant au moins un tiers de femmes. Il a aussi été refusé par la commission.
Pour rappel au Conseil national lors des élections de 2015, les femmes ne représentaient que 32% des élus et pire encore au Conseil des Etats où la représentation féminine n’a atteint que 15%.
A Genève, seule une femme est élue au Conseil d’Etat et 26 femmes sont élues au Grand Conseil genevois en 2013, soit à peine plus du quart de notre parlement. Moins encore qu’en 2005 où elles n’étaient déjà que 31, quand je vous parlais de recul ! À titre de comparaison, la Suède frise la parité avec ses 43,6% de femmes élues, sans parler du Rwanda où plus de 60% de femmes occupent le parlement.
Aujourd’hui, un mouvement mondial est né avec le hashtag me too; pour la première fois depuis longtemps, des revendications féminines occupent quotidiennement une place importante dans les médias, dans les festivals et lors de la plupart des remises de prix. Il faut absolument profiter que la parole des femmes soit enfin audible pour réclamer :
- la fin du harcèlement et la condamnation effective de toutes ses formes;
- la fin des contrats précaires;
- l’égalité salariale à tous les niveaux;
- la mise en place de quotas dans les postes à responsabilité, instances dirigeantes, conseils de Fondation et le canton de Genève et les partis politiques doivent montrer l’exemple en nommant autant de femmes que d’hommes dans tous les conseils d’administration et ceci dès le prochain renouvellement;
- la protection absolue des femmes victimes de violence conjugale et en particulier celles qui ont fui pour trouver refuge dans notre canton.
Et si des mesures contraignantes ne sont pas prises, alors oui les femmes de ce canton et je l’espère de notre pays devront à nouveau croiser les bras de manière significative comme elles l’ont fait en 1991.
Chères amies et camarades, Mesdames et Messieurs, comme l’a dit la Conseillère fédérale, le temps des mesures volontaires est terminé et j’ajoute celui des mesurettes aussi ! C’est en unissant toutes nos indignations que nous arriverons à nous faire entendre.
Je vous remercie de votre attention.
Marjorie de Chastonay Candidate des Verts au Conseil d’Etat
2 commentaires sur « Discours du 8 mars: Journée internationale de lutte pour les droits des femmes »
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